Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 7 janvier 2019
Fiscalité locale

Taxe d'habitation : le gouvernement envisage finalement son maintien pour les ménages les plus aisés

Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, s’est dit prêt, hier, à abandonner la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % de ménages aux revenus les plus élevés prévue en 2021, à l’occasion du « Grand rendez-vous »  organisé par Europe 1-CNews-Les Échos. « Si nous répondons « non »  à chaque demande des Français, que nous ne sommes pas capables d'écouter la demande de justice qui s'exprime partout en France, nous ne réussirons pas le débat », a indiqué Bruno Le Maire en précisant que le gouvernement avait « engagé cette suppression pour les Français les plus modestes »  afin qu’elle soit « un soutien important à leur vie quotidienne ».
Il a ainsi suggéré de « soumettre à discussion »  la question aux Français, dans le cadre du débat national qui doit s’ouvrir mi-janvier. « On peut très bien demander aux Français s'il est légitime de la supprimer pour les 20 % les plus riches », a proposé le ministre de l’Économie qui a rappelé que « la priorité à [s]es yeux n'est pas de rétablir un ISF [impôt de solidarité sur la fortune] ». Le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, a également confirmé, ce matin sur France Inter, que « se pose la question des 20 % restants ».
Pour le gouvernement, cette volte-face serait intéressante financièrement et politiquement. Alors que le président de la République avait indiqué au 100e Congrès des maires que « si cet impôts [la TH] est injuste, il y a peu de chance qu’il soit juste pour les 20% restants », le gouvernement se plie cependant à une raison « budgétaire, d'abord, puisque le coût pour l'État s'élève à 7 milliards d’euros sans qu'aucun financement ne se dessine clairement pour l'heure », rappelle Les Échos, et une raison « politique, ensuite, car il n'est guère populaire, en ces temps de fronde fiscale, de faire baisser les impôts des ménages les plus aisés ».
Le gouvernement entendrait, cependant, à la fois répondre aux revendications de justice fiscale des Gilets jaunes ainsi que d’une partie de la population et satisfaire les maires et les présidents d’intercommunalité pour qui cette taxe constitue une ressource très importante puisqu’elle représente plus du tiers des recettes fiscales du bloc communal.

La menace de la non-conformité à la Constitution
Le gouvernement avait pourtant, initialement, décidé d’élargir cette suppression totale de la taxe d’habitation aux 20 % des foyers les plus aisés face au risque d'inconstitutionnalité. En effet, si le Conseil constitutionnel n’a pas d’emblée retenu que cette mesure gouvernementale méconnaissait le principe d’égalité devant les charges publiques - dans son avis sur la loi de finances pour 2018 (dans laquelle est seulement prévu le dégrèvement de la taxe d’habitation pour 80 % des foyers les moins aisés) - , il a toutefois pris soin de préciser que, à l’avenir, il pourrait « réexaminer ces questions en fonctionn notamment de la façon dont sera traitée la situation des contribuables restant assujettis à la taxe d’habitation dans le cadre d’une réforme annoncée de la fiscalité locale ».
Un nouveau casse-tête pourrait donc s’annoncer pour le gouvernement si les Français venaient à rejeter la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % des foyers aux revenus les plus élevés.
Pour rappel, une première baisse de 30 % de cette taxe a déjà été actée pour environ 80 % des foyers au titre de leur résidence principale. En 2019, elle doit être également abattue de 65 %, avant de l’être à 100 % en 2020 et pour les années qui suivront (un dégrèvement total estimé à « 10,1 milliards d’euros »  à partir de 2020, selon l’évaluation de la loi de finances pour 2018). Le paiement de la taxe est, en revanche, pour l’heure, maintenu pour les 20 % de contribuables aux revenus les plus élevés. Les résidences secondaires continuent, elles, d’être taxées.
A.W.

Consulter l’avis du Conseil constitutionnel de décembre 2017.

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